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Carnets de voyage
16 septembre 2006

Mardi 23: Visite de Bamako et arrivée à Ségou

Le matin, réveil assez matinal et, après un bon petit déjeuner pour nous mettre en forme, nous passons aux formalités de change. Le banquier, comme il sied à des personnes de notre importance!, se déplace en personne et les opérations se font, en toute simplicité et dans la plus grande confiance, au milieu du jardin à l'ombre d'une paillote. Un pas de plus a été fait car, maintenant, nantis de nos francs CFA, nos premiers achats que nous avons hâte de faire, peuvent se réaliser.

Bamako_2Malgré l'heure matinale, il fait déjà très chaud lorsque nous partons en direction du musée national qui va nous permettre d'avoir un aperçu se ce que nous allons découvrir tout au long de notre périple. Celui-ci est installé au nord de la ville dans des locaux financés par la France. Une première partie, très intéressante, est consacrée sur l'importance de plus en plus primordiale, dans la vie économique du pays, de la culture du coton qui, une fois tissé, permet de réaliser de magnifiques tissus mais qui, pour l'essentiel, est exporté vers les pays occidentaux. Le Mali, si pauvre, mise beaucoup sue cette richesse et met tout en œuvre pour développer sa production et son savoir-faire en ce domaine.

Une deuxième pièce, nous familiarise, avec l'aide d'un guide, avec la cosmogonie dogon, les pratiques animistes, le rôle des hommes et des femmes dans la vie malienne ainsi que celui des animaux: crocodile égale longévité et quadrillage des champs, caméléon signifie sagesse... Dans la nature tout a un sens et tout est signifiant. Il faut dire qu'au Mali, si la religion officielle est l'islam, 35% de la population est encore animiste. C'est dire la force de la croyance aux âmes et aux esprits qui régissent toute vie et tout événement. Nous apprenons que les Dogons seraient arrivés à Bandiagara au XII° siècle quittant le Mandé, leur région d'origine, par refus de se convertir à la religion musulmane. En fait, si les mythes cosmogoniques sont communs aux différentes populations originaires du Mandé, Bambaras, Peuls, Bozos, c'est sans doute chez les Dogons qu'ils sont encore le plus vivace faisant partie intégrante de leur vie quotidienne. Chez les Dogons, tout est expliqué par la mythologie, les forces surnaturelles étant tout aussi réelles que le monde matériel qui les entoure.

Ainsi les masques dont la face épurée à l'extrême, souvent un simple rectangle coupé par la saillie du nez, à une valeur symbolique, jouent un rôle essentiel dans les rites d'initiation durant lesquels le futur initié est informé des traditions ancestrales. Avant cet enseignement, le masque est un danger recelant en lui des forces redoutables qu'il faut apprendre à maîtriser. Celui qui porte un masque ne revêt pas un déguisement mais devient celui qu'il représente. Il est significatif de savoir que les masques, à l'inverse des statuettes qui sont l'œuvre des forgerons, ne sont pas faits par de spécialistes mais par ceux qui vont les porter. Chez les Bambaras, le travail est effectué loin des regards profanes par les membres d'une société n'domo qui regroupe tous les incirconcis. Les masques sont réservés aux cérémonies et sont complétés par un costume permettant de caractériser la personnage mythique représenté. Le grand masque sirige dogon qui représente l'ancêtre des hommes n'est exhibé que tous les 60 ans lors des fêtes du sigi.

Les statuettes, en bois ou en bronze, sont l'œuvre des forgerons et jouent un rôle primordial aussi. Elles sont également rituelles et représentent dans une grande diversité de formes, les ancêtres ou des êtres mythiques. Un monde riche et complexe s'ouvre à nous et fait naître une intense curiosité.

En fin de matinée, c'est-à-dire au plus gros de la chaleur, nous quittons Bamako pour Ségou. Avec un peu d'appréhension nous nous casons non sans mal et sous les yeux hilares d'une troupe de gamins venus assister à notre départ, dans l'antédiluvien minibus qui a pour charge de nous mener, vaillamment, nous l'espérons du moins, au travers du Mali. Nous avons quelques doutes à ce sujet mais comme nous n'avons pas le choix, nous préférons, d'un commun accord taire nos craintes.

Une longue route d'asphalte rouge monte interminablement vers le nord du pays. Le paysage est fait de savane, d"herbes sèches et de grands arbres appelés Basalo. Mais pénétrer dans cette savane parfois très dense, écrasée par un soleil omniprésent et impitoyable, serait pour nous une gageure. Régulièrement, nous traversons de petits villages où nous sommes obligés de ralentir et même de presque nous arrêter tant la foule des piétons qui vaquent nonchalamment à leurs occupations sans se préoccuper le moins du monde de la circulation, est dense. Au passage, nous apercevons toujours les mêmes petites échoppes qui vendent de tout, bric-à-brac de mille objets recyclés et dont la première destination a, depuis longtemps, été oubliée comme, par exemple, ces outres taillées dans d'anciens pneus. Toujours aussi la même forêt de visages souriant qui nous dévisagent avec curiosité et où prédominent les enfants. Quel est donc ce groupe de gens transpirant et au teint blafard tassé dans ce minibus si inconfortable?

Bamako_1Nous décidons de nous arrêter dans un de ces villages qui abrite un marché couvert un peu plus important. Au milieu des taxis brousse, des charrettes tirées par des ânes faméliques et des bicyclette, les camions déboulent à toute allure dans u concert discordants de klaxons. Première leçon, avoir toujours l'oreille aux aguets pour les entendre arriver car, à aucun moment, ils ne ralentirons. J'essaie de faire quelques photos, quelques portraits. Je me rend vite compte que c'est un vrai problème car il y a un refus quasi général de laisser emprisonner son image dans la petite boite noire. Le plus simple est encore de demander l'autorisation qui est parfois donnée et, surtout, de ne pas insister. Après tout, que dirions-nous si on nous prenait ainsi en photo? Les enfants, moyennant quelques  menues monnaies, sont les plus facile à convaincre et, en plus, sont tout heureux de nous faire plaisir.

Nous sommes complètement abasourdis par l'animation, le brouhaha ambiant. Chaque endroit où nos yeux se posent est une source d'étonnement à chaque fois renouvelé. Là, des légumes que nous n'avons encore jamais vus et que nous serions bien en peine de nommer. Plus loin des denrées aux odeurs et aux couleurs étranges. Sur le trottoir, des hommes s'affairent accroupis dans la poussière. Nous nous approchons, curieux, mais faisons immédiatement demi-tour, écœurés. Un mouton vient d'être tué et tout ce monde s'occupe activement à le dépecer, en plein soleil entouré du vrombissement d'une nuée de mouches affamées... Nos sens sont mis à rude épreuve, mais je pense qu'il va bien falloir que nous nous habituions à ce genre de chose et que nous oubliions nos réflexes d'occidentaux aseptisés.

Le marché est divisé par corporation: bouchers, poissonniers d'un côté, légumes et bazar plus loin. Mais il recèle une unité. Tout est en plein air, en pleine chaleur et, le plus souvent, à même la terre au milieu de la poussière.

Nous nous arrêtons pour déjeuner à Fana où bière et poulet sont au rendez-vous. Le service est un peu plus rapide que prévu et nous pouvons reprendre notre route en début d'après-midi.

Entre Fana et Ségou, la végétation se transforme peu à peu et le paysage devient de plus en plus agréable. Il semble que l'implantation  humaine est plus importante. Si l'herbe est encore sèche et jaune, les champs sont cultivés, gardés par ces fameux arbres disséminés çà et là et, bientôt par d'extraordinaires baobabs, de tailles bien supérieures, aux branches tourmentées complètement dénudées en cette saison qui dressent vers le ciel comme d'immenses bras tels d'énormes rhizomes de gingembre plantés là. des chèvres, en liberté, broutent l'herbe ras e des champs. Des ânes aussi qui vont et viennent au gré de leur fantaisie. De temps en temps, nous croisons sur la route qui s'étend rectiligne à perte de vue, des carrioles tirées par des bœufs ou des mulets à bord desquelles s'entassent femmes et enfants qui nous adressent au passage de chaleureux saluts dans un joyeux brouhaha. D'autres femmes, leurs bébés solidement arrimés dans le dos et entourées d'une ribambelle de jeunes enfants, avancent d'un pas chaloupé en file indienne la tête lourdement chargée de seaux remplis à ras bord ou de fagots. Elles marchent ainsi sous le soleil brûlant, paraissant insensibles à la chaleur et à la fatigue, d'un pas sûr et gracieux.

villageL'architecture des petits villages que nous traversons se modifie insensiblement. Les masures que nous avons vues jusqu'ici, piètres avatars des demeures occidentales, font peu à peu place  à des cases en terre sèches et des huttes aux toits de paille plus conformes à cette région du monde. Les lignes sont sobres, tout en arrondis harmonieux. Une architecture du désert, totalement différente à tout ce que nous avons pu voir auparavant, qui fait corps et s'insère parfaitement dans le paysage environnant où la couleur dominante est l'ocre. Régulièrement, nous devons faire halte devant les postes frontières de gendarmerie qui jalonnent notre route. Petites oasis où fourmillent les gamins volubiles, aux mains remplies de fruits, de babioles qu'ils tendent vers nous avec un sourire radieux. Pendant que Christelle et Mamadou négocient notre passage, nous en profitons pour nous promener parmi eux et faire quelques achats et, surtout, distribuer pour le plus grands bonheur de chacun, de menus cadeaux.

Enfin arrivés à Ségou en fin d'après-midi alors que le soleil déjà tombe à l'horizon, nous mettons un peu de temps à trouver un hôtel, celui initialement prévu étant complet. Pendant que Christelle s'occupe de nous trouver un gîte pour la nuit, nous en profitons pour nous promener au bord du Niger et admirer notre premier coucher de soleil sur ce fleuve immense et majestueux dont la berge opposée, qui se perd dans la brume du crépuscule, est , d'après notre estimation, à environ 1 km. La lumière est dorée. La température a perdu son agressivité et est délicieusement douce. Le panorama respire le calme et la paysage est d'une beauté et d'une sérénité incomparable. Le soleil descend rapidement comme c'est toujours le cas sous ces latitudes et, lorsque nous atteignons enfin notre hôtel, bel établissement avec jardin intérieur et, luxe suprême, eau chaude et drap pour dormir, la nuit est complètement tombée.

Après nous être rapidement rafraîchis et dépoussiérés, nous retournons dans le centre de Ségou pour dîner. Heureusement que Mamadou connaît bien le coin car, sans lumière, sans signalisation et par des routes défoncées, plus d'un se serait contenté de rester à l'hôtel. Au menu du soir, du capitaine, gros poisson péché dans le Niger que nous allons apprendre à connaître et à apprécier. Ce qui vaut mieux, car ce sera, avec le poulet, l'essentiel de notre subsistance pour les quinze jours qui vont suivre.

Segou_coucher_soleil_sur_Niger

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